skating rink ✧ (evan)

✧ 13 ans plus tôt. mercredi soir, 22h.

Alek venait de quitter en douce sa nouvelle maison. Une maison qu’il n’appréciait pas tellement pour le moment. Jon était un homme bien pour sa mère, il le savait. C’était bien mieux que son père qui l’avait battu presque à mort quelques temps plus tôt. Alek en gardait encore quelques séquelles et sa mère lui avait interdit de pratiquer une quelconque activité sportive. Le médecin avait dit la même chose ; mais Alek, il avait rien à faire de ce qu’il avait à lui dire.
C’est donc avec encore avec l’apparence d’un gamin qui sortait d’une bagarre d’ado qu’il quitta la maison, un sac de sport en main. Passant par la fenêtre de sa chambre, il n’eut aucun mal à trouver un passage afin de quitter l’endroit ; et il avait déjà fait du repérage, le gosse. Il avait pensé scrupuleusement sa fuite pour une heure ou deux. Il savait où il allait, il savait où était la patinoire.
La marche ne fut d’ailleurs pas longue et, guettant autour de lui le moindre passage, il finit par sortir un pied de biche pour ouvrir la porte arrière du bâtiment. L’instant d’après, il se retrouvait dans l’enceinte, sortant ses patins avant de les enfiler aussitôt. Il ne perdit pas de temps avant de rejoindre l’énorme surface de glace, la casque sur les oreilles, de la bonne musique, la bonne recette pour bien se sentir. Les éclairages étaient moindres ici, il faisait presque sombre, mais dans cet endroit couvert, il se sentait comme chez lui. En Ukraine, là où il habitait avant, il s’amusait à péter le cadenas avant d’entrer dans le même type d’endroit. Il passait le comptoir, empruntait des patins et tentait parfois d’imiter les grands qu’il avait déjà vu.
Aujourd’hui, il faisait pareil, il avait comme l’impression de voler, de glisser, une sensation au final inexplicable. Mais cette sensation le faisait se sentir tellement bien qu’il en oubliait tout ce qui l’entourait, il tombait petit à petit dans son petit monde jusqu’à y être complètement ancré et que plus rien ne puisse l’en ressortir. Sauf la présence d’une personne.

✧ 13 ans plus tôt. mercredi soir, 22h.

tu as bien du mal à trouver le sommeil, ce soir. te tournant et te retournant dans ton lit, terminant par te relever et enfiler un jogging et un pull pour palier à l'air frais de ta chambre. tu tournes un peu en rond, tu sais franchement pas quoi faire et, si tu avais un minimum de considération pour tes devoirs, sans doute que tu en profiterais pour revenir sur ton exercice de mathématiques lâchement abandonné quelques heures plus tôt. mais, non. tu n'en as pas envie. t'es trop préoccupé. depuis quelque temps déjà. depuis le remariage de ton père, en réalité. même si ... le temps a passé et sans doute que tu devrais avoir digéré la nouvelle, mais t'as encore du mal. tu retiens un soupir, ton attention soudainement attirée par du bruit dans le jardin. tu ouvres la fenêtre et fronces les sourcils en distinguant la silhouette de ton demi-frère. tu attrapes ta veste et te glisses à ton tour dans le jardin, contournant la maison pour le suivre. tu ne devrais clairement pas faire ça, mais ... ça t'intrigues bien trop. et puis, tu t'emmerdais ... alors bon. tu prends garde à ne pas faire de bruit, le suivant jusqu'à ... jusqu'à la patinoire. et t'es un peu étonné. d'autant plus intrigué par la présence du brun à cet endroit. tu te mords l'intérieur de la joue et te résous à le suivre à l'intérieur, attendant que le bruit dans les locaux se calme pour attraper une paire de patin et l'enfiler, arrivant ensuite face à la patinoire en elle-même. tu restes un peu à l'écart, l'observant pendant plusieurs minutes. c'est qu'il se débrouille plutôt bien. tu n'as toujours pas compris ce qu'il fait ici, mais tu t'avances un peu, à quelques centimètres seulement de la glace. alekseï semble remarquer ta présence et tu attends d'être certain qu'il t'entende. tu as remarqué les écouteurs qu'il porte. je savais pas que tu savais patiner. tu lâches simplement, avant d'avancer jusqu'à la glace pour patiner toi aussi. quitte à être la ... tu te tournes vers le brun, un regard interrogateur en sa direction. sans doute que tu le regretteras de l'avoir suivi.

✧ 13 ans plus tôt. mercredi soir, 22h.

alek, il est perdu dans son monde, ça y est. sauf que y’a toujours quelque chose qui cloche quand ça va trop bien. il était sortit de la maison sans encombre, arrivé ici et même pas suivit ? non, il n’y croyait pas une seule seconde qu’il allait pouvoir passer ici plusieurs heures sans être dérangé ; il avait pas tort. sauf que ça pouvait pas être lui, il pouvait pas tomber sur lui ?
et pourtant si, son demi-frère, il approchait sur la glace. stupéfait, alek retira son casque, continuait légèrement à patiner, il finit par s’arrêter, ayant perdu de la vitesse. rien que le fait de la voir ici le met en rogne. comment ? lui ? il n’avait aucune envie de le voir ! et surtout pas sur la glace ! il avait tellement peur que ce salop aille en parler à quiconque, et lui ruine la vie qu’il tentait de reconstruire. il n’assumait pas le fait d’être un grand patineur, il n’assumait pas tout cela et il n’avait pas la moindre idée du pourquoi du comment. un égo surdimensionné ou une peur enfouie ? il faut dire que son père l’avait traité de tafiole et l’avait frappé quand il avait su que son fils prenait sur plaisir à glisser sur la glace. cette remontrance ne lui avait jamais évoqué un quelconque dégoût contre le patinage. néanmoins, cela lui avait fait comprendre qu’il avait plutôt intérêt à ce que personne ne s’en rende compte.
mais aujourd’hui, y’avait lui. sauf que lui aussi, il avait des patins au pied. lui aussi, il semblait savoir patiner. et lui aussi était étonné de voir l’autre savoir le faire aussi. tant de points communs qui devraient les rapprocher, comme tous les autres qui les devraient le faire, ces points communs en dehors du patinage qui au fond, ne font que les repousser l’un et l’autre parce qu’il ne se supporte pas. parce que derrière cela, y’a un homme qui les sépare. y’a jon. le père qu’il n’a jamais eu. serait-ce donc de la jalousie entre eux ? ce serait pas étonnant.
alek voulait pas voir evan. qu’est-ce tu fous là ? qu’il lui lâche. il savait pas quoi dire d’autre, il était déjà assez agressif comme ça. puis il ajoute quand même. y’a pas intérêt à ce que tu parles de ça à qui que ce soit, sinon je t’éclate, okay ? alek, il voulait juste pas se faire prendre. rien de méchant, non ?