i struggle to find any truth in your lies. (nash)

keep calm, you're good bad

L’histoire de Nash était simple, avant de devenir un cas clinique. Deux parents, un frère ainé, un père qui s’en va alors qu’il est encore gamin ; c’est mieux pour tout le monde, qu’on lui a dit. Son enfance est simple, relativement douce. Il a des amis à défaut d’être proche de son frère. Il a des amis et ça lui suffit, à Nash. Avec eux, il continue son petit bonhomme de vie. Comme tout le monde, il passe par l’adolescence. Fait quelques petites crises, commence un groupe de rock, passe à la folk, se fait son premier tatouage sans l’autorisation de sa mère. Son frère quitte la maison dès qu’il en a l’occasion ; ça n’étonne personne, c’est comme s’il exécrait cette famille depuis toujours. Un peu exagéré, certes, mais dans les yeux d’un jeune Nash en pleine crise existentiel, ça en avait tout l’air. Mais il s’en fout, après tout. Il les a, eux. Les six mousquetaires, tous différents, tous aussi parfaits  à ces yeux les uns que les autres. Ils sont à l’aube de leurs dix-huit ans et certains se demandent quoi faire de leurs vies. Il sait, lui. Presque comme s’il avait toujours su. Ce qu’il veut, Nash, c’est travailler avec les enfants. Allez savoir pourquoi… alors il se jette à l’eau, quitte à couler un peu. Beaucoup pensent qu’il n’a rien à foutre dans cette voie. D’autres se disent que ce n’est qu’une lubie. Et pourtant… c’est à peu près au moment de l’explosion de leur groupe qu’il a eu son diplôme. Comme quoi dans la vie, on ne peut pas tout avoir en même temps. Mais il est fier, Nash, un peu trop parfois. Il essaye de recoller les morceaux de ces amitiés brisées, mais à force de se prendre des murs, il finit par abandonner. Pas totalement, non, il reste en contact avec tous, plus ou moins. Seulement les choses ne sont plus pareil. Plus jamais. Lui continue sa route. Il accepte une affectation dans une petite école publique d’Oxford. Remettre les pendules à zéro, il vient d’avoir vingt-trois ans, la vie lui sourit. Pendant plus d’un an, il aura fait profil bas. Il sait que, pour beaucoup de ces mères de famille, il n’est qu’un joli petit bout de viande dans une petite chemise bien taillée. Bien sûr qu’il sent leurs regards. Il s’en fout. Jusqu’au sien. Elle s’appelait Trish. S’appelle toujours, Trish. Lorsqu’ils se sont rencontrés, elle était en pleine procédure de divorce. Son fils était élève dans l’école de Nash ; pas dans sa classe, cependant. Elle avait quelque chose de singulier. D’un peu… brisé. Dire qu’il ne l’a pas aimée tout de suite serait mentir. Mais leur histoire était compliquée. Ils la rendaient compliquée. Un an et demi d’une passion toute contrôlée. D’une discrétion incroyable. Jusqu’à ce que son ex entre en jeu. Comment il avait appris la chose, Nash ne le saura probablement jamais. Il ne s’attendait certainement pas non plus à ce qu’il lui saute dessus à la sortie des classes. Un poing dans la figure, puis dans le plexus, puis de nouveau la mâchoire. Un homme à terre, un autre qui l’insulte. Et dans sa rage, la folie d’un inconnu qui lui sauve la vie…

Il avait perdu connaissance, le temps de quelques minutes, devant le regard effaré des parents d’élèves. L’institutrice avait appelé les pompiers ; et la police. Le reste de cette soirée reste encore aujourd’hui floue, dans son esprit. Il se souvenait juste avoir eu du mal à respirer ; et se dire qu’il avait probablement perdu son job avec toutes ces conneries. Il a pourtant bien vu la mine du médecin qui s’occupait de lui ce soir là. Pas de celle qu’on oublie. Quelque chose n’allait pas, mais ni lui ni Nash n’arrivait à mettre le doigt déçu. Son souffle ne lui revenait pas. Côte cassée ? Non. Un scanner, puis un deuxième. Des litres de sang dans de mini tubes envoyés çà et là. Pour que, finalement, le diagnostique tombe. Fibrose pulmonaire. Et qu’on lui demande s’il avait des antécédents dans la famille ; s’il avait pris tel ou tel médicament ces dernières années ; s’il avait travaillé dans un environnement à risque. Avant de comprendre qu’il n’y avait pas de raison. Et qu’il était sacrément jeune, pour être atteint de cette merde. Vous savez comme, dans certaines séries télé médicales, ils en arrivent parfois à se dire qu’il faut arrêter de chercher les causes et commencer à traiter le problème ? Et bien avec lui, ils se sont acharnés.

Ça fait plus d’un an que le diagnostique est tombé. Un an qu’il a arrêté la clope, qu’il tourne aux corticoïdes, qu’il a tout revu, de son alimentation à son entrainement physique. Plus d’un an qu’elle lui a dit avoir fait une erreur avec lui. Plus d’un an que sa vie n’a plus de goût. On lui a promis des miracles, des traitements géniaux, des diagnostiques différentiels. Jusqu’à ce qu’il en ait marre. Vous comprenez, Nash, il a envie de reprendre le contrôle de sa putain de vie. Ce qu’il en reste, du moins. Parce qu’il le sait, la seule et unique chose qui peut le sauver, c’est une greffe. Il est sur la liste. Mais y a pas d’urgence. Il peut encore tenir cinq, dix ans comme ça. Avant que ça ne devienne critique. À vivre qu’à moitié. Il n’a mis personne au courant pour l’instant. C’est con, mais il sait que le jour où sa mère, son frère, même son père seront au courant, tout changera. Et il n’est pas encore prêt. Alors, à la place, il s’est barré. Nicola, elle a tourné la page à l’autre bout du monde, non ? Il l’a rejointe, sans même s’annoncer, il y a quoi, six mois ? Bien sûr qu’elle lui a ouvert la porte. Certainement parce qu’elle devait voir sur son visage que quelque chose n’allait pas. Il lui a dit. Voilà. Les autres, étrangement, n’ont pas tardé à débarquer. Comme si c’était le moment pour eux tous de se retrouver. De retrouver leur vie, ensemble. Et l’apprécier, cette vie. Comme il se doit.